29 Mai 2018

Les satellites Pléiades suivent le déclin de glaciers des Pyrénées françaises

En 2013 et 2017, les satellites Pléiades ont acquis des images stéréoscopiques à très haute résolution du glacier d'Ossoue, le plus grand glacier des Pyrénées françaises. Le constat est alarmant. Le glacier subit un amincissement accéléré, tout comme ses 2 voisins du massif du Vignemale en raison du réchauffement climatique.

Représentation 3D du glacier d'Ossoue réalisée à partir d'images stéréoscopiques capturées par le satellite Pléiades-1A le 23 septembre 2013 et de données IGN Espagne et France. Crédits : CESBIO, Simon Gascoin.

Un suivi satellite depuis 2013

Depuis 2013, le glacier d'Ossoue situé dans le massif du Vignemale est suivi depuis l'Espace. Dans le cadre de la recette ''thématique utilisateur'' coordonnée par le CNES, le satellite Pléiades-1A a acquis, le 23 septembre 2013, le premier couple d'images stéréoscopiques. Le 8 octobre 2017, le satellite Pléiades-1B capturait 2 nouvelles images d'une résolution au sol de 70 cm.

is-geometrie_pleiades_ossoue.jpg

Caractéristiques d'acquisition du couple d'images stéréoscopiques par un satellite Pléiades. Crédits : CESBIO, Simon Gascoin. 

Le glacier d'ossoue

D'une superficie de 45 ha en 2012, le glacier d'Ossoue est le plus grand glacier des Pyrénées françaises. Il est le vestige d’un glacier qui recouvrait tout le massif du Vignemale durant le Petit âge glaciaire. Depuis 2002, l'association Moraine suit son retrait à l'aide de 8 balises. Leurs mesures (vitesse de déplacement, hauteur, densité de la neige) prolongent les observations réalisées à la fin des années 80. Elles sont essentielles pour calibrer et valider les données satellites.

Crédits de l'image Pléiades : CNES 2013, Distribution Airbus DS.

 

Un logiciel ''martien'' pour les représentations 3D

Les images Pléiades ont permis à Simon Gascoin, chercheur au CESBIO, de reproduire en 3D le glacier d'Ossoue avec une résolution spatiale de 4 m et d'estimer les hauteurs du glacier avec une précision proche de 0,5 m. Le tout grâce à un logiciel open source développé par la NASA pour représenter la surface de la Lune ou de Mars ! Ses résultats sont publiés le 29 mai 2018 dans la revue Pirineos.

« Le logiciel ASP de la NASA est un outil très performant pour réaliser des modèles numériques de terrain à partir d'images Pléiades. Il valorise toute leur profondeur radiométrique codée sur 12 bits (soit 4096 valeurs pour chaque pixel) et non sur 8 bits (256 valeurs) comme le sont les images des appareils photos » précise l'expert qui a utilisé le même logiciel pour établir la carte des hauteurs de neige de montagne de haute altitude — une première mondiale.

Un déclin relié au réchauffement climatique

is_ossue_variation_hauteur2013_2017.jpg

Variation de la hauteur du glacier d'Ossoue entre 2013 et 2017 calculée (1) grâce aux images acquises par les satellites Pléiades et (2) par les 8 balises glaciologiques. Les nombres indiquent les numéros des balises. Crédits : CESBIO, Simon Gascoin.

En comparant les représentations 3D de 2013 et 2017, le chercheur a observé un amincissement du glacier d'Ossoue d'environ 1,5 m/an, comparable à celui mesuré par les balises glaciologiques. Un amincissement plus rapide au centre du glacier et dans sa langue glaciaire se dégage aussi. « L'amincissement du glacier d'Ossoue n'a hélas pas ralenti au cours des 4 dernières années en dépit d'hivers assez enneigés.

Ce retrait est clairement lié au changement climatique. La vitesse de fonte du glacier d'Ossoue est parmi les plus élevées en France

indique Simon Gascoin.

Les images Pléiades ont aussi permis de quantifier l'amincissement des 2 petits frères du glacier d'Ossoue : Le Petit Vignemale et le glacier des Oulettes. Non équipés de balises glaciologiques, leur suivi par satellites à très haute résolution est essentiel et moins coûteux qu'un suivi par photos aériennes.

 

Glaciers sous les yeux des pléiades

Les glaciers du Mont-Blanc sont aussi suivis par les satellites Pléiades via le programme Kalideos du CNES. En 2012 et 2013, des glaciers en Islande, Antarctique mais aussi sur les hauteurs de l'Himalaya et des Andes ont également été observés par les satellites français (Berthier et al., 2014) . « Cette méthode est actuellement en train de se généraliser. De nombreux collègues, notamment étrangers, sont demandeurs des données à très haute résolution des Pléiades. Afin de faciliter leur accès à ces images précieuses, nous avons lancé mi-2016 un nouveau programme financé par le CNES, le ''Pléiades Glacier Observatory'' » indique Etienne Berthier, chercheur au LEGOS. Sur les 200 000 glaciers de notre planète, seules quelques dizaines sont actuellement équipés de balises glaciologiques. 

Références des publications

Gascoin, S. & René, P. (2018) Evolution récente des glaciers du Vignemale (2013-2017), Pirineos, 173, e037,  doi:10.3989/pirineos.2018.173004

Berthier E., Vincent C., Magnússon E., Gunnlaugsson Á. Þ., Pitte P., Le Meur E., Masiokas M., Ruiz L., Pálsson F., Belart J. M. C. and Wagnon P. (2014) Glacier topography and elevation changes derived from Pléiades sub-meter stereo images, The Cryosphere, 8(6), 2275-2291, doi: 10.5194/tc-8-2275-2014.

Contacts

  • Contact scientifique au CESBIO/OMP : Simon Gascoin, simon.gascoin at cesbio.cnes.fr
  • Contact scientifique au LEGOS/OMP : Etienne Berthier, etienne.berthier at legos.obs-mip.fr
  • Contact au CNES : Anne Lifermann,  responsable programme océanographie côtière, littoral et cryosphère, anne.lifermann at cnes.fr

 

En savoir plus 

Glaciers : un triste record observé par Pléiades (vidéo CNES de 2015)