16 Janvier 2012

1992 : Mephisto observe la solidification en l'absence de convection

Comment se solidifient les alliages métalliques ? Une question fondamentale pour l’élaboration des matériaux que la micropesanteur permet d’étudier sans les perturbations des mouvements de convection dans la phase liquide.
Méphisto

50 ans de résultats scientifiques

1992 : Mephisto observe la solidification en l'absence de convection.

L’expérience MEPHISTO ((Matériel pour l’Etude des PHénomènes Intéressants la Solidification sur Terre et en Orbite) a ainsi confirmé les modèles qui prévoient la valeur des paramètres de solidification pour lesquels la surface de contact entre le solide en le liquide cesse d’être plane et se structure alors en petites cellules. De cette succession régulière de petites vallées et de montagnes disposées selon un réseau géométrique, dépendent les propriétés physiques et mécaniques des alliages. En donnant des informations de référence sur les mécanismes de la solidification, MEPHISTO a contribué à l’amélioration des procédés d’élaboration de matériaux sur terre.

La fusion-solidification d’un alliage métallique peut s’étudier en insérant partiellement un barreau métallique dans un four. L’extrémité extérieure du barreau est solide tandis que l’autre, située dans le four est liquide. Si on déplace le four, la surface de contact entre le solide et le liquide, appelée interface de solidification, se déplace par rapport au barreau.. Ce mouvement crée un déséquilibre et donc une différence de température entre le solide et le liquide appelée surfusion. La forme de cette l’interface mobile dépend de la concentration de l’alliage (dans le cas de l’expérience il s’agit d’étain et de bismuth), de la vitesse de déplacement du four le long du barreau appelée « vitesse de tirage » et des mouvements de convection dans le métal fondu.

La micropesanteur permet d’éliminer ces mouvements de convection car elle supprime l’action des différences de densité entre les parties chaudes et froides du liquide qui sont à l’origine de ces mouvements sur terre, les parties chaudes ayant tendance à monter et les froides à descendre.

Il reste donc, dans l’espace, deux paramètres ajustables, la concentration initiale de l’alliage composant le barreau et la vitesse de tirage.

L’observation de la solidification d’alliages métalliques est difficile car ils sont opaques à la lumière et l’interface de solidification ne peut s’observer directement qu’après la fin du processus.

L’instrument MEPHISTO, développé, et opéré conjointement, par le CNES et le CEA a été conçu pour obtenir des informations sur l’interface pendant la solidification, en utilisant l’effet Seebeck : au contact de deux corps à des températures différentes se crée une différence de potentiel électrique appelée thermocouple. La tension électrique aux bornes de l’échantillon est très faible, de l’ordre du microvolt. La mesurer avec des précisions de l’ordre du nanovolt était un des défis de l’expérience. Cette tension qui constitue une mesure de la surfusion à l’interface mobile était transmise au sol en temps réel. Comme la surfusion dépend de la structure de l’interface, les scientifiques ont pu ainsi vérifier les théories de la solidification en détectant le seuil de vitesse de tirage au-delà duquel l’interface cesse d’être plane et se couvre de rides. Celles-ci préfigurent la formation, pour des vitesses de tirage encore plus fortes, de dendrites, sortes de sapins de Noël de solide s’avançant dans le liquide.

Cette expérience a été la première observation en temps réel du phénomène de solidification en l’absence de convection, les expériences réalisées jusqu’alors nécessitant de ramener au sol des échantillons solidifiés pour analyse en temps différé. Aujourd’hui ces recherches se poursuivent en étudiant dans la Station Spatiale Internationale la solidification d’alliages modèles transparents. Cette transparence permet d’avoir directement des images de l’interface entre liquide et solide. Ces images sont transmises en temps quasi-réel aux scientifiques dans leurs laboratoires au sol, qui peuvent ainsi contrôler de manière précise le déroulement de l’expérience et la renouveler en faisant varier les paramètres qui les intéressent.

 

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